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Activités collectives, Séminaire / Delicortal
Le 17 juin 2016
Inka Wissner
Phraséologie et diatopie : une rencontre. L’exemple d’un corpus de l’Ouest de la France
La diatopie intéresse de plus en plus les phraséologues, et la phraséologie ne peut plus échapper au champ d’étude des diatopiciens. Comme des phénomènes de grammaire qui sont ressentis comme ‘divergents’, des séquences plus ou moins figées qui sont d’extension restreinte dans l’espace francophone passent souvent inaperçues chez leurs utilisateurs, mais tendent à interpeler les locuteurs d’autres aires. Elles provoquent alors des réactions diverses, allant de la surprise au sourire amusé. La locution verbale se faire appeler Arthur “se faire engueuler” ne semble pas aussi usuelle en Belgique, en Suisse ou au Québec qu’en France ou reste souvent incompris ; et un Français risque de mal comprendre son voisin suisse romand qui l’informe qu’il est chaud pour lui signaler qu’il est irrité ou en colère (ex. tirés de Lamiroy 2010, 151 et 49). De tels phraséologismes diatopiquement marqués sont d’origines diverses : les uns ont été formés au sein de la variété diatopique (comme les précédents), d’autres ont été transférés depuis une variété voisine ou encore une autre langue, comme See you ! [siju] en français calédonien.
Dans le cadre du séminaire Délicortal, je propose d’étudier non pas une variété de français emblématique comme le québécois ou ‘exotique’ comme le calédonien, mais plutôt un français dont la spécificité diatopique est peu connue. Il s’agit du français dans le Centre-Ouest de la France, largement soumis à la pression centralisatrice normative depuis quatre siècles, et à ce titre en effet relativement peu marqué sur le plan diatopique. D’autant plus surprenants paraissent les résultats d’une analyse que j’ai menée à partir d’un corpus littéraire volumineux dans le cadre de mon projet doctoral (dont les résultats sont partiellement publiés dans Wissner 2013). Il s’agit de l’œuvre romanesque d’un écrivain réaliste vendéen, Y. Viollier : 26 romans, publiés de 1972 à 2009, totalisant environ 6 500 pages. Son examen poussé permet de dévoiler des diatopismes phraséologiques diversifiés et nombreux qui sont utilisés sans jugement de valeur. On y trouve autant des diatopismes emblématiques comme le surnom ventre à choux que des adverbes vieillissants (tel à la basseur) ou encore des syntagmes verbaux usuels et légitimes comme avoir la grappe (dont le statut diatopiquement marqué n’est donc pas nécessairement conscient pour ses utilisateurs, qui le jugent normatif).
L’analyse du comportement paradigmatique et syntagmatique des phraséologismes dans le corpus retenu, donc aussi de leur type phraséologique (locutions ou collocations ?), de leur vitalité et de leur origine mobilise la documentation contemporaine et ancienne qui porte sur le français général, le français dans l’espace francophone et le dialecte endogène (dictionnaires, atlas, glossaires), mais aussi les résultats d’enquêtes menées sur le terrain. La conférence sera ainsi l’occasion de confronter deux perspectives complémentaires : celle des diatopiciens, dont je fais partie, et celle des spécialistes de la phraséologie du Lidilem.
Références bibliographiques :
LAMIROY, Béatrice (2010), Les expressions verbales figées de la francophonie. Belgique, France, Québec et Suisse (coll. L’essentiel français), Paris : Éditions Ophrys.
WISSNER, Inka (2013), La Vendée dans l’écriture littéraire. Analyse du vocabulaire régional chez Yves Viollier (coll. Bibliothèque de Linguistique Romane X), Strasbourg : Éditions de linguistique et de philologie.
Date
10h-11h
Localisation
Salle B105 (bâtiment Stendhal)
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