Construire une culture de la paix : perspectives discursives et actions éducatives
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Le projet DéfiPaix (2020-2024) est mené entre l’Université Grenoble Alpes (Lidilem) et l’Université d’Antioquia en Colombie au titre éponyme. Financé par le dispositif Ecos Nord, Le Gis Genre en France et Minciencias, ICETEX et l’Université d’Antioquia en Colombie, il est porté par Beatriz Villa et Claudine Moïse en France et Fabio Arismendi en Colombie.
L’origine du conflit armé colombien, durant les années 1960, est rurale et multifactorielle. Une série de déterminants politiques et sociaux, qu’il est possible de retracer depuis la période coloniale, ont convergé dans un contexte international (la Révolution Cubaine notamment) pour donner naissance aux premières guérillas. Cependant, l’extrême inégalité dans l’accès aux terres agricoles (Berry 2002) déclenche l’émergence du plus long conflit armé du continent, qui se poursuit encore aujourd’hui, mais selon d’autres logiques à considérer : la mise en œuvre de divers accords de paix, le plus récent, en 2016, ayant été signé avec les Farc-ep, guérilla la plus ancienne et la plus nombreuse ; l’intervention d’autres acteurs armés tels que les paramilitaires (milices armées privées) et le narcotrafic. Au cours des 60 dernières années, le Registre Unique des Victimes (RUV)(1) estime que plus de 9 millions de personnes ont été victimes du conflit, dont 49,8% sont des hommes, 0,1 % la communauté LGBTI+ et 50,1 % des femmes.
À partir de la situation colombienne et de son expérience du processus de paix, nous avons mené une recherche consacrée aux discours de la paix et de réparation portés par les femmes, discours envisagés d’un point de vue de leurs caractéristiques (socio)linguistiques et des actions qui en découlent, éducatives, didactiques et artistiques. Il s’ est agi à la fois de rendre compte des réflexions menées au sein du projet de recherche mais aussi de donner la parole à des experts du conflit en Colombie et de sa résolution.
Nos analyses, après différentes missions menées en Colombie avec les équipes françaises et colombiennes, se sont orientées selon trois axes :
- Axe 1. Discours pour la paix portés par les femmes
Lorsque nous parlons des femmes dans le conflit colombien, nous nous référons aux femmes civiles victimes, les femmes combattantes, les femmes activistes et les femmes leaders. Grâce à l’introduction de la notion d’analyse différenciée (enfoque diferencial) dans les années 1990 en Colombie, les collectifs féministes et de femmes ont montré comment les types de violence vécus par les femmes dans le conflit ne sont pas les mêmes que ceux des hommes et sont invisibles. La violence a donc dû être analysée et traitée différemment. Dans le cadre d’une culture de la paix, entendue comme un ensemble de valeurs et de comportements fondés sur la liberté, la justice, la démocratie, la tolérance, la solidarité, la coopération, le pluralisme, la diversité culturelle, le dialogue et la compréhension (ONU octobre 1999), il s’agirait de voir la singularité des prises de parole des femmes dans le processus de paix. Ce premier axe s’intéresse donc spécifiquement, notamment à travers des entretiens menés auprès des femmes leaders dans le cadre du projet, à la façon dont elles construisent en discours une politique de paix. Qu’est-ce que qui caractérise la violence faites aux femmes ? Quelle est la part aussi de la violence des femmes ? Pour construire un discours de paix, quelle est la force discursive du témoignage ? Comment sont mobilisés l’expérience des femmes et la mémoire du conflit ? Comment s’exprime la force agentive de ces leaders ?
- Axe 2. Pratiques artistiques, mémoire et construction de la paix
Face à la violence et après la signature des accords de paix, les victimes ont été rendues visibles et des procédures pour leur réparation ont été créées. Les femmes, au début oubliées des négociations à la Havane, ont tout de même réussi à s’y faire une place et, comme dit en amont, elles sont aussi combattantes et jouent régulièrement des rôles politiques importants. Les femmes se sont organisées dans des collectifs ou des associations qui ont cherché à reconstruire le tissu social, à consolider les processus de réconciliation, de pardon et de paix, à améliorer les conditions de vie et les pratiques productives, à tisser des réseaux d’entreprenariat et d’intégration productive, et à défendre leurs droits. Même si on compte aussi peu de femmes parmi les protagonistes institutionnels visibles du processus, ce sont pourtant elles qui – comme dans toutes les crises – tiennent un rôle fondamental pour que la vie continue à travers l’éducation, le soin, l’hygiène et l’alimentaire. Anonymes ou figures de proue, les femmes, avant même les accords de paix, ont été nombreuses à œuvrer pour une issue pacifiste de ce conflit de 60 ans.
L’action des femmes passe aussi par des collectifs de promotion de l’art et de la créativité parfois à des fins touristiques. Quelles sont les formes artistiques mobilisées ? Quelle est la place des femmes dans la création ? Comment se mobilisent-elles ? Comment est représentée la figure féminine dans l’expression artistique ?
- Axe 3. Programmes de formation pour une culture de la paix
Pour répondre aux exigences éducatives de construction d’une culture de la paix, les récits de vie recueillis auprès des femmes (civiles, combattantes, activistes et leaders) et leur contenu thématique peuvent servir de base pour construire, dans le domaine de la didactique des langues, une formation à l’interculturalité et à une culture de la paix, à destination d’enseignant·es de langue étrangère. En effet, le public d’enseignant·es ou de formateur·trices constituent le public idoine pour une approche méthodique du discours de la paix. À partir des notions qui ont émergé des analyses et des récits de vie, quelles sont les valeurs ciblées d’un point de vue didactique ? En regard d’une pédagogie de la paix quelles séquences sont possibles et significatives dans le cas de la Colombie ? Comment de tels dispositifs permettent des formes de réflexivité ?
1. Gouvernement Colombien. (s. d.). Unidad para las Ví ctimas. [https://www.unidadvictimas.gov.co/es registro-unico-de-victimas-ruv/37394]
Membres
- Responsables du projet
- Pour la France : Beatriz Villa et Claudine Moïse
- Pour la Colombie : Fabio Arismendi
- Membres
Equipe colombienne | Equipe française |
Fabio Arismendi (Université de Antioquia, Medellín) Astrid Aristizabal, UdA Mauricio Cardenas, UdA Doris Colorado, UdA Natalia Marin, UdA Juan Pablo Meza, UdA Maria Alejandra, Rios (Middlebury Insitut of International Studies (USA) Denis Ramírez, UdA |
Guillonne Balaguer, UGA Véronique Durocher, Université de Québec à Trois-Rivières Stéphanie Galligani, UGA Marie-Laure Guilland, UGA Claire Hugonnier, UGA Claudine Moïse, UGA Diana-Lee Simon, UGA Beatriz Villa, UGA |
Partenaires
Evènement
Colloque DéfiPaix - Le rôle des femmes dans la construction d’une culture de la paix en Colombie : perspectives discursives et éducatives, 4 et 5 décembre 2024, UGA
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